Dernière lettre de Jean Chevrin.
23 mai 1943

Rentrant chez moi, le 4 avril à 21 heures, je fus assommé à coups de matraque en ouvrant la porte. Réagissant, je fis demi-tour et me sauvai. Ils tirèrent deux coups de revolver sans me toucher, cependant je m'écroulai. résultat des coups de matraque.

Je fus ramené à la maison, mi-nu, menottes aux chevilles et aux poignets, étendu sur le carreau de la chambre et battu de 9 heures à minuit à coups de pied dans le ventre dans le ventre, des coups de matraque et de nerfs de boeuf. N'ayant pas voulu parler, je fus emmené, à minuit et demie, toujours nu, en auto, au commissaire central de Bourges. J'y restai jusqu'au mardi. N'ayant pas parlé, je fus emmené à Orléans. Là, pour me faire parler, on me mettait sur une table à plat ventre, on me tenait par les pieds et les mains, un torchon dans la bouche, des types de chaque côté frappaient avec des nerfs de boeuf sur les cuisses et les épaules. De temps en temps, ils s'arrêtaient pour me demander si je m'appelais Gaston et si j'étais commandant du secteur.

Quand le sang commençait à couler, ils s'arrêtaient et me passaient la flamme d'un briquet entre les doigts de pied. Je suis resté du dimanche au jeudi sans manger ni boire. Le jeudi après-midi, après une séance, ils me firent voir trois amis dont la femme qui conduisit les flics chez moi, chose que j'ignorais à ce moment-là. Ils me reconnurent; moi, je "dérouillais" pour ne pas les dénoncer, et il avaient été arrêtés avant moi.

Maurice Jenot Louis Chevrin Félicitations L'instruction